Le KMSKA possède la plus importante collection d'Ensor au monde… et la plus diversifiée. En plus de carnets de croquis, des dessins et des gravures, le KMSKA dispose au sein de sa collection près de 40 tableaux. Ces tableaux nous permettent de retranscrire les multiples expérimentations et évolutions de la carrière d’Ensor. Les dessins et gravures contribuent à donner une vision globale de l'artiste.

Ce n'est donc pas une surprise que James Ensor ait sa propre aile au musée. Quelques nouvelles salles de couleur blanche lui sont dédiées. L’œuvre d’Ensor constitue dans la collection du KMSKA le point de pivot entre l'art avant et après 1880. Elle crée le lien entre l'art où récit et image réaliste prévalent et l'art où lumière, couleur et forme sont librement utilisées. Plusieurs salles vous permettront d'entrer dans le monde merveilleux d'Ensor avec ses salons bourgeois, mascarades, natures mortes, vues de mer, etc. Et si vous veniez ?

Premier jalon

Au début de sa carrière, c’est dans l’œuvre du peintre réaliste Gustave Courbet que le jeune James Ensor puise sa première source d’inspiration. En installant son chevalet dehors ou dans son salon, il peint ce qui l’entoure. De formation académique, Ensor construit ses couches picturales selon les enseignements reçus : en appliquant un apprêt teinté et en mélangeant la couleur. Puis, il découvre des articles sur la peinture impressionniste et sent que c’est bien là, la nouvelle voie qu'il veut suivre. Mais alors, comment ? On y parle de la couleur pure, non mélangée. Ensor place, une fois de plus, sa sœur Mitche,  habituée à poser pour lui, à table. Il prépare sa toile comme toujours, avec un apprêt, mais ensuite, il fait quelque chose de nouveau : il utilise des couleurs non mélangées : jaune chrome, rouge vermillon, bleu cobalt, blanc de plomb, oui, beaucoup de blanc de plomb. Ensor baptise d'abord le tableau Au pays des couleurs. Nous le connaissons actuellement comme La mangeuse d'huîtres, première peinture lumineuse de l'histoire de l'art belge. Nous sommes en 1882. La rupture avec les sombres salons bourgeois est totale.

De l'obscurité à la lumière, du Salon bourgeois...
... à la Mangeuse d'huîtres.

Déchainé, avec masques

Quatre ans plus tard, Ensor les voit pour la première fois, les toiles des peintres impressionnistes français, au salon d'hiver du cercle d'avant-garde Les XX en 1886 où il a pu s’arranger avec le secrétaire. Il y compare sa propre Mangeuse d'huîtres, ses vues de mer, ses œuvres « impressionnistes », avec celles de Monet et de Renoir. Et puis…. il passe à autre chose. Par exemple, Adam et Eve chassés du Paradis (1887). La technique est toujours impressionniste. Cependant, il utilise la couleur non mélangée de manière personnelle, expressive, dans des scènes construites avec des formes, si on peut dire, capricieuses. Fini le style contrôlé, Ensor se déchaîne.

Adam et Eve chassés du Paradis
La chute des anges rebelles

Ensor aime provoquer. Cette soif de dérision, il la conjugue avec une vision pessimiste de l'humanité. Si l'on y ajoute le fait que la boutique de sa mère se remplit souvent de masques, on obtient en toute logique de nombreuses peintures de masques. À la fin du XIXe siècle, bien d’autres artistes ont représenté des masques comme élément décoratif, ou pour dissimuler mystérieusement l'identité d'un personnage. Chez Ensor, et c'est bien là sa découverte, les masques révèlent toutefois la véritable nature de l'homme. L'Intrigue (1890) en est l'un des meilleurs exemples.

L’intrigue
Squelettes se disputant un pendu

Six fois Ensor

La Mangeuse d'huîtres, Adam et Eve chassés du Paradis, L'Intrigue sont trois pièces maîtresses dans l'œuvre de James Ensor. Les trois tableaux,  avec de nombreuses natures mortes, les premiers salons bourgeois et les dernières marines, font partie de la collection du KMSKA. Ils remplissent deux salles complètes. Ces natures mortes et les marines constituent le fil conducteur de la vie d'Ensor. Quelles que soient les expérimentations qu'il entreprend, Ensor reviendra toujours aux natures mortes et vues de mer.

Nous montrons les peintures d'Ensor dans deux nouvelles salles, dont celle-ci.
Au milieu des deux salles se trouvent quatre petits cabinets où, principalement par le biais du multimédia, vous apprendrez à mieux connaître Ensor.

Au milieu des deux salles se trouvent quatre petits cabinets où nous présentons, principalement par le biais du multimédia, d'autres facettes d'Ensor et de notre collection, comme par exemple son large réseau, car Ensor était loin d'être un solitaire, bien que le mythe le veuille ainsi. Ou bien son processus créatif qui fait l'objet du projet Ensor Research Project du KMSKA. Ou encore ses œuvres sur papier à l'encre, au graphite, et à la craie, qui sont en raison de leur sensibilité particulière à la lumière exposées en présentations intermittentes. Les œuvres sur papier nous rapprochent d'Ensor. Il arrive que l’artiste complète une vue d’intérieure d’antan par une nouvelle fantaisie en offrant par là une signification distincte aux deux. Tout cela est possible chez James Ensor, au KMSKA.

Nature morte avec chinoiserie de 1905, une nature morte tardive d'Ensor.
Ustensiles de cheminée et masques, Ensor a ultérieurement complété son dessin réaliste par une fantaisie de masque.

Bref, vous l’aurez compris, dans cette aile vous rencontrerez Ensor : l'homme, les jalons au cours de sa vie, ses prédilections, ses techniques, les personnes de son entourage. Soyez les bienvenus !