Lagravure une et indivisible
La gravure et une indivisible
Cent fois au planeur soumettez votre planche
Polissez la sans cesse et la repolissez.
Voici mes traits barbelés pour saluer nos graveurs.
Gravure art de belle taille sublimé de mystère, art corsé
d’alchimie, d’alambics et de cornues, art diabolique fleurant
soufre et vif argent, art servi par acides puissants, art alimenté
par sels efferves cents, art d’essences immatérielles, art caustique,
métallique, anti-académique, art propre aux gentilshommes
vaillants de cœur, de sens et d’esprit allumés.
Et j’évoque Jacques Callot votre roi au noble caractère,
Et vous Francisco Goya, brave et téméraire. Et vous grands
humoristes d’Angleterre chargeant envers et contre tous et nos
gragraveurs (sic) de Belgique et ceux diserts de France et ceux
des pays où souvent les cloches où vibrent les dards et les épées.
Et vous surtout notre Rops, mordant et généreux vous aimiez
donner des armes à vous adversaires.
La pointe acérée du bon graveur s’apparente au fleuret d’escri-
-meur, à la plume affinée du poète, ci la griffe du chat huant
aux zig-zags de l’éclair, aux crocs de la panthère, au diament (sic) du
miroitier, et de fil en aiguille au va et vient rapide de l’aiguille
de nos mères, au fil conducteur et flottant de la vierge, au chas
menu amenuisé par nos sœurs.
Pointes nobles, armes blanches ou fauves passées au fil de
l’acide bleu, pointes spirituelles combien éloignées des brosses
hérissées, des palettes maculées d’huiles rances et fétides : matières
visqueuses communes aux peintres des morceaux les plus gros.
Hélas ! trois fois Hélas !!! des graveurs dévoyés manquent à leur devoir
trahissent le beau métier, leurs traits épais tels cables chargés d’encre
lourdes, leurs cuivres noyés, enfumés sous les goudrons poisseux, graissés
assombris, salis, sur frottés par les chiffrons rugueux ou éraflés sous les
loques ne disent rien qui vaille.
Des manœuvres grossiers, souillons anti-voluptueux retroussent les
traits les plus fins , manipulent sans respect les tailles les plus tendres, les vélins les plus doux.
Eteignez vos réchauds ! Renversez vos cuvettes ! tripoteurs zingueurs planant
à l’aveuglette, travailleurs d’états, vagues bénéficiaires obsédés par des gains
illusoires, plombiers balourds barbotant abîmés dans les fanges, plongés dans
les bourbes. Horreurs de la vue, de l’odorat, du bon goût et du toucher.
Et pour résumer aimons la gravure vierge et pure, la gravure conserva-
-trice des chefs – d’œuvres de nos peintres, la gravure de nos pères et de nos
maîtres aimés, la gravure honnête, claire et nette, une et indivisible.
James Ensor
Ostende, mars 1935
,Gravure
Pour la gravure
publié dans etude de Schivot
Gravure
À propos de ce document d’archive
Identification
- Type d'objetmanuscrite
- TitreLagravure une et indivisible
- Date03/1935
- RelationsAuteur: Ensor, James
Callot, Jacques, de Goya y Lucientes, Francisco José, Rops, Felicien - LieuOstende
- Sujetgraveren [drukprocedé]
Caractéristiques
- Genrecontemplative prose
- Supportpapier
- Matériel d'écriturepennen
- Numéro de l’image numériqueA4116
- Droits d'auteurPublic domain
Annotations
- Contenu de l'annotationLe manuscrit figure également dans le catalogue de la bibliothèque Getty (http://primo.getty.edu/GRI:GETTY_ALMA21162216640001551) | - Le titre est noté au crayon au recto en haut comme "La gravure et une indivisible". - Au verso, il est noté au crayon : "Pour la gravure. Publié dans étude de schevot".
Lieu
- Lieu de stockageKMSKA archiefdepot
- Partie de l'archive
Données supplémentaires
- Publications liées
- Manifeste IIIFhttps://iiif.kmska.be/iiif/3/34930/manifest.json
- Identifiant d'enregistrement